Anthony Masure

chercheur en design

Vers une informatique invisible : l’art et le design face aux neurosciences

Contexte

Communication dans le cadre de la journée « Arts et neurosciences : nouveaux terrains d’expérimentations » (dir. Justine Emard), Nantes, Stereolux.

Résumé

Les liens entre informatique et psychologie hantent l’informatique depuis ses débuts, qu’on pense à l’augmentation des facultés intellectuelles par la machine (Vannevar Bush) ou le développement d’un cerveau électronique capable de remplacer l’humain dans certaines tâches (Alan Turing). Alors que plusieurs approches psychologiques coexistaient aux débuts de la cybernétique – allant de la psychanalyse aux neurosciences – celles-ci vont progressivement se resserrer autour d’une visée comportementaliste (où domine la recherche de performance et d’efficience) que l’on retrouve aujourd’hui dans les interfaces dites « neuronales », c’est-à-dire qui fonctionnent en visualisant l’activité des neurones. Leur développement s’inscrit dans le paradigme de « l’informatique ubiquitaire », développé par Mark Weiser à la fin des années 1980, et qui prône la réduction des médiations entre l’humain et la machine au profit de leur intégration dans le quotidien. Si cette visée aura facilité les usages de l’informatique via le développement d’interfaces « naturelles » (tangibles, vocales, et désormais neuronales), elle engendre plusieurs problèmes tels que le formatage des expériences, la collecte de données sans consentement, ou encore le syndrôme de la réponse unique. Pour les champs de l’art et du design, ces technologies rejouent l’idée romantique du « génie », qui « créé » dans l’instant, sans barrière avec le contact avec la matière – une idée au cœur des fantasmes de l’apprentissage automatique (deep learning) et des générateurs en tout genre. Il s’agit alors de savoir ce que peuvent faire l’art et le design en contexte de technoscience afin que les programmes des interfaces neuronales, encore en émergence, ne se limitent pas à des dispositifs prescriptifs.

« Si la fascination des artistes pour notre cerveau n’est en soi pas nouvelle - l’analyse de la manière dont nous pensons, rêvons et agissons a toujours été une source d’inspiration féconde, le progrès des technologies médicales, les nouvelles connaissances scientifiques, la démocratisation des interfaces neuronales et la puissance de calcul des ordinateurs ouvrent aujourd’hui des terrains d’expérimentations inédits pour les artistes.

Que ce soit grâce à des dispositifs d’interaction qui donnent accès à l’activité de notre cerveau ou via l’exploration des méandres de mieux en mieux connus de notre boîte crânienne, les croisements entre arts et neurosciences se développent et laissent entrevoir de nouvelles créations communes.

Cet événement, organisé avec l’artiste Justine Emard, proposera un tour d’horizon de différents axes de collaborations entre artistes et neuroscientifiques à travers les regards croisés d’acteur·rices engagé·es dans ce type de démarche.

Il est articulé autour de deux axes thématiques, chacun composé de trois courtes conférences et d’une table ronde et proposant les témoignages croisés d’artistes, de designers et de scientifiques. »

Dans le cadre de la semaine du cerveau 2023