Anthony Masure

chercheur en design

Post-numérique ou post-politique ? Le cas des objets « connectés »

Contexte

Conférence donnée au colloque international de design RAID, « Objet(s) post-numérique(s) », École Supérieure des Sciences et Technologies du Design (Essted), université de la Manouba, Tunis

Résumé

Depuis une dizaine d’années environ, le champ des objets dits « connectés » (à Internet) a fait son chemin dans notre quotidien (domotique, wearables, etc.). Fréquemment qualifiés « d’intelligents », ces derniers se situent à l’intrication du design produit et de la programmation. Pourtant, alors que le vocabulaire de l’intelligence et de la connexion semble impliquer des valeurs d’objectivation et de partage, les objets qui sont désignés sous ce terme se caractérisent trop souvent par le fait que leur « centre de commande » est en fait une « boîte noire » où « l’individu devient seulement le spectateur des résultats du fonctionnement des machines » (Gilbert Simondon). Reliés à des « applications » numériques, les objets « connectés » ne semblent exister que parce qu’il est loisible de les fabriquer.

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Depuis une dizaine d’années environ, le champ des objets dits « connectés » (à Internet) a fait son chemin dans notre quotidien (domotique, wearables, etc.). Fréquemment qualifiés « d’intelligents », ces derniers se situent à l’intrication du design produit et de la programmation. Pourtant, alors que le vocabulaire de l’intelligence et de la connexion semble impliquer des valeurs d’objectivation et de partage, les objets qui sont désignés sous ce terme se caractérisent trop souvent par le fait que leur « centre de commande » (Gilbert Simondon) est en fait une « boîte noire » où « l’individu devient seulement le spectateur des résultats du fonctionnement des machines » (Gilbert Simondon). Reliés à des « applications » numériques, les objets « connectés » ne semblent exister que parce qu’il est loisible de les fabriquer – comme le montre avec ironie le compte Twitter Internet of Shit ou des séries comme Black Mirror qui dénoncent leurs problèmes de sécurisation et d’obsolescence de ces produits (Tristan Nitot, Mathias Rollot).

Dès lors, comment penser des démarches de design qui ne se contentent pas d’explorer de nouveaux « possibles » technologiques juste parce qu’ils existent ? À rebours d’une technique instrumentalisée, nous souhaitons, dans cette communication, examiner des directions de travail plus soutenables permettant de ‹ ménager des espaces de liberté › et de multiplier ce faisant les occasions de pilotage ou d’orientation (Norbert Wiener, Michel Foucault) permettant à chacun de compter pour soi » (Pierre-Damien Huyghe). Nous nous demanderons alors s’il est envisageable de qualifier ce travail de « post-numérique » (terme qui, chez Grégory Chatonsky, désigne un mouvement artistique), au sens où le numérique, désormais partout (Lev Manovich), est devenu un « milieu technique » qui reconfigure d’autant insidieusement plus notre quotidien que ses enjeux sociopoliques sont laissés sous silence dans les promesses des discours marketing (Evgeny Morozov). Une telle initiative implique une visée politique du design (William Morris, Annick Lantenois, Alessandro Mendini), à même de dégager des modes de négociation et de co-construction permettant d’habiter collectivement notre époque.

Vidéo

Captation vidéo de ma conférence « Manifeste pour des objets stupides », séminaire de recherche PragmaTIC « Réels augmentés ? », CommUniTIC / Labex SMS, université Toulouse – Jean Jaurès, 19 octobre 2017.

Les rencontres annuelles internationales du design sont nées d’une initiative de l’École Supérieure des Sciences et Technologies du Design et s’articulent autour de deux volets majeurs : un scientifique portant un regard prospectif sur le domaine de la recherche et un autre expérientiel, tourné vers l’exploration de nouvelles formes de pratiques et d’échanges, visant l’ouverture du design sur d’autres domaines et d’autres territoires. La vision des RAID aspire à sillonner et à saisir de nouvelles formes d’interactions possibles entre le design et ses environnements scientifiques, professionnels, culturels, etc. Car le design est avant tout multidisciplinaire et créateur de ponts. C’est en cela que les RAID se focalisent sur la particularité d’une perception systémique de ce qui est donné à entrevoir, à comprendre et à concevoir en design, pour le design et par le design (Findeli, 2005). Les RAID en sont à leur troisieme édition, qui se tiendra durant trois jours du 26 au 28 avril 2017 à l’ESSTED sous la thématique « objet (s) post numérique(s) ». Cette édition découle de l’intérêt porté au champ la technologie numérique et de ce qu’elle pourrait générer comme opportunités dans notre société. L’objectif serait de saisir la direction que prendraient nos modes de vie sous son emprise. Le champ de l’objet(s) post-numérique(s) nous nous permet de nous interroger davantage sur les défis et les opportunités de nos sociétés de demain. Dans ce nouvel environnement, appréhender les transformations à venir et saisir de nouvelles opportunités et les innovations sont les enjeux et les défis qui se posent au numérique.

Comité directeur
Naoufel ABBES (directeur des RAID)
Anis SEMLALI (directeur de l’ESSTED)
Salma KETATA
Omar BLIBECH
Hayla MEDDEB
Ameni FEKI
Amir HAMZAOUI

Comité d’organisation
Aziza AZZOUZ
Azza RAJHI
Abdelmounem TAOUAI
Sana TAMZINI
Ali BOUDEN
Mohamed Marouen M’BARKI
Nader BOUKEDI
Fathi M’HAMDI
Héla ZOUARI
Kamel KHALFAT
Olfa HELALI
Ines ZILI